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Covid-19 : pour Alain Fischer, « le niveau de protection des plus de 60 ans n’est plus optimal »

Le professeur et immunologiste Alain Fischer, président du conseil d’orientation de la stratégie vaccinale, reconnaît que les vaccins, très efficaces, ont un effet transitoire. Il incite les plus de 60 ans à un deuxième rappel.

Propos recueillis parAnne-Laure Barret , Mis à jour le
Alain Fischer.
Alain Fischer. © Sipa

Pourquoi recommandez-vous une quatrième dose à tous les plus de 60 ans ?
Nous faisons face à une vague nouvelle, liée à la progression du sous-variant d’Omicron BA.5 et à l’abandon des gestes barrière. Il y a un certain degré d’incertitude sur les paramètres de l’épidémie, donc on ignore quelle sera son ampleur. En revanche, nous savons que, même si ce virus, plus transmissible encore que ses prédécesseurs de janvier, BA.1, et de mars, BA.2, n’est pas plus virulent, l’augmentation du nombre de cas entraîne mécaniquement plus d’hospitalisations et de décès. Or, actuellement, le niveau d’immunité de la population est bon mais pas parfait. C’est pour cela qu’il faut recommander un deuxième rappel aux plus de 60 ans et aux personnes fragiles, dont le système et la mémoire immunitaires sont moins robustes. Aujourd’hui, malgré l’effet cumulatif des injections et des infections, leur niveau de protection n’est plus optimal. Par ailleurs, les vaccins restent sûrs : il n’y a pas plus d’effets secondaires lors d’une quatrième dose. C’est simple, il faut que les 8,5 millions de Français éligibles qui ne l’ont pas encore reçue se rendent chez leur pharmacie ou chez leur généraliste !

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Comprenez-vous la fatigue vaccinale de ceux qui se demandent si une injection supplémentaire est nécessaire ?
Il faut en passer par là car ces vaccins ont un effet transitoire. Leur bénéfice est néanmoins important puisqu’ils diminuent radicalement le risque de se retrouver à l’hôpital, voire de mourir. Les données montrent qu’avec une quatrième dose le taux d’anticorps neutralisants remonte au même niveau qu’après la troisième. La protection contre les formes graves est donc rétablie à plus de 90 % pour un certain nombre de mois. Franchement, une piqûre deux fois par an, ce n’est pas si terrible ! C’est de la prévention, un peu comme une visite annuelle chez le dentiste ou l’ophtalmo. Certes, cette vaccination ne nous prémunit pas pour deux ou trois ans, mais elle va permettre de passer le cap de cette septième vague en attendant l’automne.

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Pourquoi ne parvient-on pas à « éradiquer » le virus grâce à la vaccination ?
Même les pays les mieux vaccinés au monde, comme le Portugal, font face à des rebonds : le niveau d’immunité n’y est pas optimal. Les reprises épidémiques se produisent parce que le virus mute pour échapper à la réponse immunitaire ; il a beaucoup évolué depuis que les vaccins ont été conçus il y a deux ans.

Ne faudrait-il pas admettre l’échec relatif des vaccins à ARN messager ?
Ce n’est pas un échec relatif mais un immense succès, même s’il reste imparfait. Ces vaccins ont évité un très grand nombre de décès, d’hospitalisations et de confinements ! L’arrivée d’Omicron, fin 2021, a été le révélateur des limites des vaccins actuels. La protection contre l’infection et la transmission, qui n’est pas nulle, avait été la première limite identifiée. Compte tenu des modifications génétiques des variants, un certain nombre d’anticorps qui étaient neutralisants contre les variants précédents, jusqu’à Delta, le sont moins contre Omicron. Une des priorités actuelles de la recherche en vaccinologie est de comprendre pourquoi, contre le Sars-CoV-2, la vitesse de décroissance de ces anticorps est plus rapide que contre le virus HPV, par exemple. Conceptuellement, il n’y a rien de surprenant à ce qu’il soit très difficile de bloquer efficacement un virus respiratoire qui peut, très vite, toucher un organe vital : le poumon. Le vaccin contre la grippe est moins efficace que le vaccin anti-Covid.

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Ces vaccins ont évité un très grand nombre de décès, d’hospitalisations et de confinements 

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Les nouveaux vaccins à ARN messager seront-ils plus efficaces ?
Si tout va bien, nous disposerons de quatre nouveaux vaccins à l’automne. C’est une promesse de bonnes nouvelles : grâce à leur spectre d’induction de réponse immune plus large, tous ces vaccins devraient réduire le risque d’une vague importante générée par un nouveau variant. D’un côté, Moderna et Pfizer travaillent sur des produits bivalents comprenant deux séquences ARN de la protéine spike, l’une dirigée contre la souche originelle de Wuhan et l’autre contre Omicron. En attendant l’avis de l’Agence européenne des médicaments, les résultats partiels communiqués par la première firme suggèrent que l’efficacité est meilleure : le taux d’anticorps neutralisants après la vaccination serait supérieur à son niveau actuel après une injection de rappel classique. En matière de durée de protection, on pourrait de ce fait gagner quelques mois supplémentaires. Deux vaccins plus classiques fondés sur la protéine spike, ceux de Sanofi et de la société espagnole Hipra, suscitent également de l’espoir. Des données préliminaires laissent penser que celui de Sanofi, dirigé contre Bêta, induit des taux élevés d’anticorps neutralisants contre les différents variants. Celui d’Hipra, qui combine une fraction des spike Alpha et Bêta en une seule molécule, induit les mêmes effets en rappel.

Lire aussi - Covid-19 : vers une quatrième dose pour tous dès cet été ?

Quand seront-ils prêts ?
L’idéal, ce serait qu’ils le soient au début de l’automne plutôt qu’en décembre, pour être couplés avec la vaccination antigrippale. Une personne de plus de 80 ans pourrait en bénéficier dès octobre ; un sexagénaire qui ferait sa quatrième injection aujourd’hui pourrait recevoir un nouveau rappel avec ces produits neufs en décembre. 

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