La fête nationale ukrainienne sera certainement moins joyeuse que celles des années précédentes, dans le contexte de l’invasion russe qui a débuté il y a six mois. Plusieurs villes ont d’ailleurs instauré un couvre-feu, inquiétées par les risques de provocations russes.

Voilà pourtant 31 ans jour pour jour que l’Ukraine a proclamé son indépendance vis-à-vis du bloc soviétique, fragilisé par la chute du mur de Berlin en 1989.

Montée des nationalismes

Alors que des manifestations publiques se tenaient à Lviv et Kiev depuis quelques mois, cette année 1989 marque la transition entre mobilisation sociale et politisation des revendications. Une loi est ainsi votée en octobre au Parlement pour que l’ukrainien devienne la langue officielle de la république, alors soviétique.

En 1990, les Ukrainiens commencent à s’organiser pour défendre leur souveraineté. Le « Roukh », Mouvement populaire d’Ukraine, est alors fondé. Il s’agit du premier parti indépendantiste depuis 1919. Un premier pas vers cette indépendance est franchi l’année suivante, le 16 juillet 1990, lorsque – sous l’influence des députés démocrates – le Parlement adopte la Déclaration sur la souveraineté politique de l’Ukraine.

Un peu plus tôt en mars, les premières élections au Parlement ukrainien actent la fin du monopole du Parti communiste dans le pays. Les efforts du président de l’URSS Mikhaïl Gorbatchev pour calmer la montée du nationalisme s’avèrent vains.

Celui-ci avait notamment proposé d’accorder une plus large autonomie aux républiques, tout en gardant le contrôle sur la politique étrangère, l’armée et le système financier. Mais une mobilisation massive, particulièrement chez les étudiants, a poussé le dirigeant soviétique à abandonner son idée.

Coup d’État contre Gorbatchev

Un autre événement a certainement précipité l’indépendance ukrainienne, lorsqu’un coup d’État mené par les communistes orthodoxes proches du pouvoir renverse Mikhaïl Gorbatchev le 19 août 1991. Le putsch avortera deux jours plus tard, en raison d’un soulèvement populaire alimenté par Boris Eltsine. Celui-ci, président de la Fédération de Russie, dissout par décret le parti communiste et entame des discussions avec ses homologues en Ukraine et en Biélorussie.

Quelques jours après ce putsch, le 24 août, Boris Eltsine annonce avoir signé un décret reconnaissant l’indépendance de l’Estonie et de la Lettonie. Une heure plus tard, l’Ukraine décrète elle-même son indépendance.

La décision a été prise à l’issue d’une session parlementaire extraordinaire, à une écrasante majorité. 321 élus votent pour l’instauration d’un « État démocratique indépendant », face à deux votes contre, et six abstentions. Le même jour, le Parlement réclame la tenue d’un référendum pour entériner cette décision. Celui-ci se tiendra le 1er décembre, jour où plus de 90 % des Ukrainiens votants se prononcent en faveur de l’indépendance.

Ceux-ci ne cachent d’ailleurs pas leur joie, en déambulant dans les rues, armés de drapeaux ukrainiens, interdits durant l’ère soviétique sous peine de goulag. Les emblématiques bleus et jaune avaient été adoptés en 1918, lors de la première indépendance ukrainienne (qui a pris fin deux ans plus tard) avant d’être remplacés par les couleurs soviétiques.

Fin de l’hégémonie communiste

Les jours suivant le 24 août, les élus du parlement votent une série de décrets illustrant leur éloignement du régime soviétique : suspension des activités du parti communiste ukrainien et gel de ses actifs, amnistie pour les prisonniers politiques, mise en place d’un comité sur les questions militaires (dans le cadre de la création d’un ministère de la défense), etc.

Le 26 août, une mesure plus symbolique est adoptée, menant au retrait des monuments des héros communistes dans les lieux publics. Le monument de Lénine disparaît et la place de la Révolution d’octobre sur laquelle il se trouvait est rebaptisée Place de l’indépendance.

En décembre 1991, peu après le référendum et l’élection du président Leonid Kravtchouk au suffrage universel, ce dernier rencontre ses homologues russes et biélorusses pour signer les accords de Minsk, actant la mort de l’Union soviétique.